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Se mettre à table !

J’ignorais jusque-là l’origine de cette expression : priver de repas un suspect afin qu’il crache l’aveux de son crime. Chez nous, auteurs de rimes, la parole vient plutôt en mangeant. Je ne saurais dire combien de mes couplets furent écrits à table, sur un bout de nappe en papier, sur une « napkin » froissée ou même au dos d’une addition. J’ai toujours dans mes archives quelques-unes de ces reliques de bonne chère. Des vers nés au buffet d’une gare, au comptoir d’un bistrot, à la terrasse d’un café. Il fallait bien sûr avoir la présence d’esprit d’emporter ces trésors griffonnés entre deux bouchés avec le bonbon à la menthe, le cure-dent et le carton d’allumettes aux couleurs du restau. Pour le souvenir. Pour se souvenir et pour rappeler plus tard à leurs auteurs les mots qu’ils ont laissé tomber avec les miettes et les cendres.

C’est avec les couleurs, les saveurs et les parfums qu’on fabrique les chansons. Ce sont de belles au bois dormant que le plaisir de tous les sens éveille et fait surgir. Savourer un plat, entendre une mélodie et un visage vous revient en mémoire, un pays vous manque soudainement, une anecdote s’invite dans la discussion. Une chanson est à l’oreille ce qu’un plat est à la bouche : un rappel d’histoire d’amour.

Ces tables ouvertes, il faut s’y mettre. Se mettre à table, tout avouer et penser à emporter les poèmes couchés sur la nappe !

Diane Tell