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COUP DE JORAN
SUR LES HAUTES CRETES
Voilà déjà quelques années que l’Entracte a fermé ses portes. Petite oasis de liberté, d’amitié, et mélange de cuisine et de spectacles.
Légendes, souvenirs et nostalgie hantent le subconscient de ceux qui ont vaincu le brouillard du Haut Jorat. Et à chaque voyage à l’étranger ou dans les recoins perdus de chez nous, je recherche inconsciemment un bistrot idéalisé dans mon imaginaire. Une trappe, un trappon, un troquet, une ambiance, une odeur, une aventure, peu importe, mais parfois mes copains de route sautent le dîner, car le mirage de l’absolu ne se produit pas.
Aujourd’hui, avec les inspections, la paperasse, le service de l’hygiène, la chaîne du froid ou la traçabilité du produit, le menu qu’on choisit dans les casseroles de la cuisine en sirotant un vino della casa ou une « bleue » a disparu. A l’image du patron qui t’emmène te confesser sur un cageot à la cave et d’une « sommiche » aux talents provocateurs mais qui cache ses déceptions et ses tristesses dans un décolleté, semblant se venger des hommes. Où sont-ils ?
Ces loupiottes qui t’accueillent dans une clairière de montagne ou sur une plage balayée par la musique du bleu infini.
Maintenant, même les toilettes des chalets d’alpage sentent le romarin et les buvettes de nos lacs jouent aux cinq étoiles. Autrefois, on s’arrêtait chez les tantes Hélène, Eva, Emma, ou à Suchy pour un ballon du village, à moins de trois francs, alors que l’Appenzel corsé existe encore à La Praz. Et puis que sont devenus ces relais perdus en rase campagne où traînaient les vieux amants, les joueurs de cartes, les baroudeurs calmés par le parfum d’une inconnue et, où même les flics cachaient leur Volvo !
Gérer, tenir, animer, cajoler un palais gastronomique ou une gargote insolite demeurent un sacerdoce. Ainsi parfois dans l’alcôve d’une ferme des hautes crêtes, on réalise notre petit cinéma culinaire insolite.

Bouillon